The shape of water
La voilà enfin, celle que vous attendiez tous !
Quelques semaines après sa victoire aux Oscars dans les catégories :
-Meilleur film
-Meilleur réalisateur
-Meilleure musique
-Meilleure direction artistique (photographie)
Il est grand temps de revenir sur le film qui va marquer les esprits en 2018 : « The Shape of Water » du très talentueux et très Mexicain, Guillermo Del Toro.
Ce film est un bijou, un retour aux amours de Del Toro. En effet, si on analyse un peu la carrière du réalisateur, on se rend assez aisément compte que les monstres et le bestiaire qui va avec, sont la pierre angulaire du cinéma de notre Mexicain préféré.
Sa filmographie compte quelques chefs-d'oeuvres comme l'excellentissime Labyrinthe de Pan ou encore la saga Hellboy qui bien que plus accessible n'en reste pas moins fantastique et enfin le très controversé mais pourtant jouissif Pacific Rim (je ne sais pas vous mais moi voir des gentils robots qui tapent sur le museau de vilains Kaiju je trouve ça trop cool de base alors quand en plus c'est bien fait... Que demande le peuple).
On pourrait en citer beaucoup plus mais voilà pour les plus « connus » dirons-nous.
A côté de ça il a fait des trucs un peu plus moyen genre « Blade 2 » ça c'est pour ta truffe Gui Gui !
Bref revenons à nos monstres sous-marins :
Dans une Amérique en pleine guerre froide, où l'espionnage est roi et les gens bien trop paranos, Elisa (Sally Hawkins) une femme muette travaillant dans un laboratoire top secret va entamer une relation compliquée avec un monstre/dieu des abysses. Aidée par son amie Zelda (Octavia Spencer) et son voisin Giles (Richard Jenkins) elle va mettre son plan en marche et ainsi aider la créature à se sortir des séances de tortures organisée par ce maso de Richard Strickland (Michael Shannon) qui est aussi sympathique qu'une porte de prison elle-même dans une prison, elle-même en Corée du Nord, bref un gars pas giga flex avec qui on ne partagerait pas une partie de Jungle speed.
Alors oui, l'histoire n'est pas d'une complexité extrême mais là est toute l'intelligence du film. Le film dépeint, selon moi, plus une fresque poétique, un film sensoriel duquel on ne sort pas indemne. Durant deux heures, on a l'impression d'être enveloppé dans un voile aquatique duquel on ne veut pas sortir. Le titre du film colle parfaitement au long métrage, la forme de l'eau ne peut être définie que si elle est contenue dans un récipient, elle s'adapte au contour créé pour elle. Ici c'est également le cas, le film s'adapte parfaitement à ses contours, à son histoire et nous fait ressentir une certaine naïveté teintée tantôt d'amour, de joie, de tristesse et de peur. Avec, on ne va pas se le cacher, une bonne dose de frottage de poil pour l'académie (on t'a cramé Guillermo).
Comme je le disais plus haut, un thème récurrent dans le cinéma de Del Toro sont les monstres. Dans le film, le monstre est traité de différentes façons : de manière évidente, le film parle de monstre puisque celui-ci est l'un des principaux protagonistes. Mais il parle aussi du monstre enfoui en l'homme. Ici le monstre de l'histoire est le personnage campé par Michael Shannon, Mr Strickland, et cela nous est montré à travers son doigt, qui pourrit un peu comme l'âme de ce cher Richard. Le monstre n'est pas celui qui en est un physiquement mais celui qui en est un dans sa tête et dans ses actes. Il est aussi important de noter qu'en s'inspirant de la créature du lac noir pour son film et pour sa créature, Del Toro nous propose une fin alternative au film de 1954.
Une autre thématique abordée par le film est celle de la différence, elle est partout. Sans doute une part d'autobiographie pour le réalisateur qui en tant que Mexicain a dû se faire une place dans une industrie dévouée aux Américains. Peut-être une petite réponse aussi à un certain mur qui doit être « construit » sur une certaine frontière.
Le personnage principal Elisa est muette, Son amie Zelda est afro-américaine, Giles est homosexuel, l'espion qui les aide est Russe et enfin la créature. Le seul personnage qui ne fait partie d'aucune minorité dans le film est celui joué par Michael Shannon qui est l'antagoniste principal de notre histoire. Alors certes, c'est un peu beaucoup mais on sent bien la volonté du réalisateur de nous faire comprendre que les différences ne doivent pas nous effrayer, et que le pire peut se trouver en chacun de nous.
Parlons un peu plus du « décor », de l'habillage du film : la musique a été composée par le compositeur français, Alexandre Desplat et il nous donne une création des plus envoutante, une musique qui nous porte à travers tout le film et qui soutient parfaitement ce côté un peu naïf et enfantin du film. Son Oscar est archi mérité (a noté qu'il a aussi fait du super boulot sur « Good bye Lenin » ceux qui sont venus à la dernière projection sauront de quoi je parle).
Parlons un peu des choix visuels du film, là encore tout est parfait. L'eau est présente partout et le chef opérateur n'est pas tombé dans le cliché de l'eau bleue turquoise et translucide. Ici l'eau est presqu'un personnage, une entité qui donne de l'ambiance à chaque scène que ce soit au niveau sonore ou visuel, on a parfois même l'impression de pouvoir la sentir.
Une dernière petite mention pour les acteurs :
Tout d'abord, Sally Hawkins, incroyable de tendresse et de talent, malgré son mutisme, elle est très expressive et fait passer énormément d'émotion, un réel hommage au cinéma muet. (Elle aurait dû gagner l'Oscar scrogneugneu). Ensuite Richard Jenkins, le voisin de palier homosexuel fan de comédies musicales et de Broadway est parfait dans son rôle d'artiste déchu et touchant tant son personnage sonne vrai et authentique. Ensuite, Octavia Spencer, qui comme à son habitude joue parfaitement son rôle de commère ménagère, c'est sans doute selon moi le personnage le plus drôle du film, ses plaintes sur son mari sont juste parfaites. Et enfin, notre ordure préférée, Michael Shannon qui joue à la perfection le fils de ***** qu'il est censé incarner : froid, calculateur, méprisant, dégueu (scène des toilettes à l'appui),... même son pouce décédé à l'air plus cool. Bref que du beau monde à son meilleur niveau.
Tous ces éléments font de ce film un long-métrage totalement cohérent dans ses choix. Je ne pense pas avoir déjà vu un film où le titre colle aussi bien à son contenu. Un film sensoriel qui ne laisse personne indifférent. Alors je sais que mon objectivité n'est peut-être pas l'élément qui ressort le plus de cette critique mais vous verrez, laissez-vous flotter !