Ni juge ni soumise
Wouah « strip tease » sort un film! Ça parle d’Anne Gruwez, une juge, qu’on suit pendant 3 ans dans sa vie de tous les jours ! En plus, on me dit dans l’oreillette que le film a fait polémique. Délicieux ! J’adore avoir un avis sur les « buzz » du moment afin de montrer que je suis quelqu’un de « in touch ». Un pote poste un mot sur « Les copains », mon groupe facebook d’amis : « Strip tease au quai 10 ce samedi à 18h30 pour ceux que ça intéresse ». Hyper chaud de voir ce film, je saute sur l’occasion.
Rendez-vous chez « Danny », un bar dans ma douce ville de Charleroi, avec mes copains de toujours. Après quelques verres, on se dirige vers Q10 le cinéma situé sur l’ancien quai de brabant. Tout le monde est hyper motivé d’aller voir le film. Dans la file, des gens de tout âge, de différents milieux se côtoient. C’est toujours marrant de voir à quel point le cinéma à le pouvoir de rassembler un tel melting pot de gens. Après le moment galère mais inévitable de recherche de places convenables suivi de quelques arrêts stratégiques au WC, le film commence.
Dès les premières minutes, il fait mouche. Tout le monde éclate de rire devant les aventures du juge Anne. C’est sans doute la première fois qu’il m’arrive de voir une telle cohésion dans une salle. On se moque gentiment des petits malfrats qui inventent les pires excuses pour s’en tirer et des policiers qui bloquent sur la résolution d’une veille affaire. Entre ces moments de pures rigolades, un malaise s’installe. Le film continue sur sa lancée mais impossible de me détacher de ce sentiment qui semble ne pas vouloir partir comme un morceau de papier-toilette collé à ta chaussure quand tu sors des toilettes après un samedi aprem passé à Walibi (Sixflag pour les anciens).
Après 1 heure, j’arrive à mettre la main dessus. En fait, ces gens qui pleurent, qui se mettent en colère, qui crient à l’injustice… ce sont de vraies personnes. Ce ne sont pas des acteurs. Ce sont des hommes et des femmes qu’on peut croiser au coin de la rue, à l’épicerie, à la banque, au café. Ces mêmes gens à qui tu demanderais du feu pour allumer ta clope (ndlr maman si tu lis ça je ne fume pas promis). En fait, ces personnes qu’on voit à l’écran c’est nous… juste nous avec moins de chance dans la vie. Un moment d’égarement et on pourrait se retrouver à leur place. Dès lors, le film prend une nouvelle dimension en sortant de son cadre « comique ». Il nous renvoi aux travers de notre société et plus particulièrement de son système juridique. On a envie de se révolter ! Hurler devant ce spectacle, devant cette justice injuste, devant ces récidivistes qui reviennent inlassablement voir Anne pour se faire juger et se faire condamner à l’instar de lemmings qui dans la croyance populaire sautent vers leurs morts poussés par on ne sait quel instinct.
Et là dans cette brume de pensées noires, Anne apparait comme un rayon d’espoir. Face à son humanité envers ces « cas désespérés », on ne peut rester de marbre. On se dit qu’au final, il a des gens bien derrière cette bureaucratie. Ce film dénonce en même temps qu’il fait rire. Il est foncièrement beau. Il montre le coté imparfait de la société. En fait, il montre le coté imparfait de l’être humain.