Fury : Descente aux enfers dans les entrailles d'un tank
La dernière scène de Fury se clôture, les oreilles sifflent encore au son des canons et des balles traçantes. La salle reste silencieuse jusqu'au moment où le public réalise qu'il n'est pas dans l'espace confiné d'un char M4 Sherman mais bien dans une salle de cinéma. Les premiers commentaires seront courts, mais plutôt éloquent : du discret «Waow», à l’enthousiaste «C’était trop bien», en passant par le fougueux «Pu***, c’était dingue !!».
Pendant près de 2 heures 15, nous nous trouvons embarqué à bord de Fury, un char d’assaut militaire commandé par le Sergent Don ‘Wardaddy’ Collier. Selon la volonté du scénariste et réalisateur David Ayer, le film ne relate pas une célèbre manœuvre des forces alliées, comme le débarquement ou la batailles des Ardennes. L’histoire se déroule à fin de la guerre, quand le nazisme rend son dernier souffle, face à des soldats américains épuisés par des années de guerre et en manque d’effectifs. De fait, dès l’entame du film, nous apprenons que les forces blindées américaines ne font pas le poids face aux tanks allemands. Une scène met d’ailleurs en jeu un combat très disputé entre quatre Sherman et un seul Tiger I, dont je vous laisse découvrir le dénouement.
L’histoire du film en tant que telle ne dure que 24 heures, de l’aube à l’aube. Elle se déroule en avril 1945, alors que les forces alliées effectuent leurs derniers assauts dans les terres allemandes. Le Sergent Wardaddy et son équipage de cinq hommes est mis à contribution pour attaquer différents points stratégiques, avant d’avoir pour mission de bloquer un passage aux forces SS. Avec leur char ils vont devoir affronter seuls un régiment de 300 soldats avec pour seul aide l’obscurité naissante.
Si vous avez été lassé des trop nombreux films portant sur la guerre 40-45, cette dernière œuvre pourrait bien vous réconcilier avec le genre. L’ingrédient secret se trouve certainement du côté un peu plus humain du film. L’équipage a subi plusieurs semaines d’entrainements intensifs, des levés à 5h du matin, des nuits froides, de la nourriture rationnée, dans le seul but d’apprendre à se soutenir quand le moral est au plus bas. C’est Brad Pitt, en tête d’affiche, qui va excellemment bien jouer le rôle du sergent qui n’a qu’une obsession, la survie de son équipage. C’est pourtant le rookie « assistant driver » du char, Norman Ellison, qui sera le pivot du film. Interprété par Logan Lerman, c’est à lui que le public va s’identifier. Norman est le bleu qui n’a pas été formé pour la guerre et c’est à travers lui qu’on découvre le tank, puis que l’on suit ce qui arrive à cette unité. Son histoire, ses émotions, ce qu’il endure et sa faculté à prendre sa place sont au cœur du film. Pour ne pas me perdre dans de long discours, sachez que les trois autres comparses, Shia LaBoeuf (Transformers), Michael Peña (End of Watch) et Jon Bernthal (Walking Dead) méritent tout autant pour leurs rôles dans cette famille.
Mon deuxième coup de cœur va pour la qualité des images et des décors. Entièrement tourné sur pellicule, nous pouvons aussi apprécier le travail réalisé pour amener de l’authenticité aux images. C’est la première fois qu’un véritable Tiger Tank (et non une reproduction) sert au tournage d’un long métrage. Aussi, la chef costumière Maja Meschede est partie pour Berlin pour y louer d’authentique vêtements datant des années 30 et 40. Le tournage s’est déroulé en Grande-Bretagne, et le travail effectué pour nous plonger au milieu des champs de bataille est tout simplement réussi. Des entassements de cadavres, aux campements ensevelis de boue, entrecoupés d’ornières creusées par les chars et en passant par les granges délabrées, tout y est pour nous faire oublier que nous sommes installés devant notre écran.
Finalement, la seule touche qui alimentera le discours des détracteurs du genre, sera évidemment l’habituelle patte de lapin donnée aux protagonistes de l’histoire. Certainement pas autant exagérée que pour un James Bond, notre équipage aura quand même évité nombre de balles ou autres obus, alors que leurs tirs à l’aveugle auront souvent fait mouche.
Bref, une réalisation de David Ayer à recommander sans modération, qui promet de s'approcher des grands classiques du genre.